Pokémon DEPS : un remastake ?!
« Ca y est ! Ils l’ont enfin annoncé ! » Voici la réaction qu’il était possible de lire sur le net en ce 27 février 2021, alors que Pokémon célébrait ses 25 ans et que The Pokémon Company venait d’annoncer les remakes Pokémon Diamant Etincelant et Perle Scintillante. Les fameux « remakes 4G », demandés à cor et à cri depuis de (trop) longues années, au point que cela ne soit devenu un mème (j’aurais également joué sur cette attente dans ma vidéo d’anecdotes de cette génération), de quoi ravir les plus nostalgiques à l’idée de refouler le sol de Sinnoh après presque 14 ans (ou 15 selon le continent).
Tout d’abord, je tiens à (re) préciser que j’attendais avec un certain intérêt ces jeux étant donné que mes souvenirs des versions originales étaient on ne peut plus flous. Je comptais sur ce retour à Sinnoh pour me faire un nouvel avis, et pourquoi pas adorer cette génération.
« Mais c’est quoi ces graphismes ?! »
Hormis l’éternel débat quant à son contenu, ce qui retint l’attention de prime abord fut le style graphique. Traditionnellement, les remakes Pokémon nous ont habitué à reprendre l’aspect du dernier RPG principal sorti (Rubis et Saphir pour Rouge Feu et Vert Feuille par exemple). Or, DEPS prend le risque de retrouver l’angle de caméra propre aux jeux originaux.
Sur le papier, je ne trouve pas que ce soit un soucis. Evidemment, j’aurais été ravi de redécouvrir Sinnoh tout en 3D, dans le style d’Épée et Bouclier, mais le retour à une vue en 2D, avec des personnes ayant des proportions cartoonesques, peut être un parti pris intéressant, s’inscrivant plutôt bien dans la démarche fan service propre à un remake. Je voyais ça comme une façon de différencier un peu plus ce type de jeux des RPG principaux afin de proposer une expérience unique. Maintenant que les bases sont posées, il est temps de rentrer dans le vif du sujet.
« Bienvenue dans l’univers des Pokémon ! »
Le 19 novembre dernier, je me suis donc lancé dans cette aventure avec Diamant Etincelant. Ma première réaction fut de trouver les décors mignons à souhait. Rien de bien incroyable en soi, mais l’ensemble est propre. Mention spéciale pour l’eau qui ravit ma rétine. Très vite, je m’aperçois de plusieurs références visuelles aux originaux. Que ce soit les boutons en combat (Attaque, Equipe, Sac et Fuite) reprenant le code couleur initial, la Pokémontre ou encore les compartiments du sac.
Naturellement, j’en arrive à livrer mes premiers combats contre des Pokémon sauvages et me voilà surpris par l’animation brusque de lancement à ma première bataille. Pensant à un bug, j’enchaine quelques combats pour constater qu’il s’agit bel et bien de l’animation prévue par les développeurs qui ressemble à une sorte d’étrange jump scare. Suite à quoi, le Pokémon sauvage apparaît. J’apprécie, là encore, la référence à Diamant et Perle avec notre personnage qui fait d’abord face au Pokémon sauvage. Seulement, ce dernier a le droit à un second plan avant que le combat ne se lance vraiment.
Curieusement, l’animation de rencontre dans les Souterrains me semble plus cohérente, bien que toujours assez longue. En revanche, lors de certaines rencontres, j’ai été surpris, puis agacé de constater de voir mon personnage bloquer avant que le combat contre le Pokémon sauvage se lance.
Malheureusement, j’ai retrouvé le même problème avec les combats de dresseurs en un peu plus ridicule : voir notre adversaire prendre sa pose iconique avant de changer de position, sans transition, pour effectuer son lancer de ball est risible. Avoir voulu combiner les animations 4G et 8G n’était certainement pas une bonne idée. Quitte à garder les deux mises en scène, il aurait fallu animer les dresseurs pour les voir changer de pose en temps réel mais je pense avoir compris que cela aurait été un peu trop ambitieux pour ces jeux.
Le plus incompréhensible reste que l’animation des combats duo contre des Pokémon sauvages représente le meilleur compromis : les deux dresseurs font face aux Pokémon sauvages qui font d’entrée de jeu leur animation rendant le lancement de ces combats bien plus fluide.
Après un premier combat d’arène où j’ai dû m’y reprendre à plusieurs fois, j’ai pu constater qu’il me suffisait de combattre les dresseurs rencontrés pour être au niveau des champions, puis être de plus en plus en avance, jusqu’à ce qu’un fossé se forme, de quoi rouler, malgré moi, sur les jeux.
Au fur et à mesure de mon avancement, j’ai pu me construire une équipe en partie constituée de Pokémon que je n’avais jamais utilisés alors. J’ai pu découvrir les joies de combattre avec Drascore, Archéodong et Carchacrok. Malheureusement, je n’ai pu profiter de ce dernier qu’à partir de la Ligue. En effet, ce dernier peut être trouvé sous forme de Griknot uniquement dans la partie cachée de la Grotte Revêche (renommée Grotte des Égarés dans ces jeux). Partie qui n’est accessible qu’une fois la CS Force utilisable hors combat, après avoir obtenu notre sixième badge.
Autant le Multi Exp. me permit de ne pas perdre de temps à l’entrainer, autant devoir intégrer un Pokémon niveau 15 à ce stade de l’aventure est ridicule. Quitte à rendre l’obtention du Pokémon Dragon contraignante, pourquoi ne pas avoir rendu son niveau, à la capture, plus élevé ? C’est pourtant quelque chose qu’il est possible de retrouver depuis les versions Or et Argent, notamment au second sous-sol des Caves Jumelles, uniquement accessible avec Surf.
Ayant lu plusieurs témoignages sur Internet quant au niveau de difficulté propre à la Ligue Pokémon, je me suis préparé un minimum en montant mes Pokémon aux alentours du niveau 65. Au final, la quadruple faiblesse au type Sol de mon équipe ne m’empêcha pas de vaincre Cynthia à la seconde tentative.
Fidèles mais à quel prix ?
Pour être tout à fait franc, je n’ai presque plus retouché au jeu depuis que je suis devenu Maître. J’avoue avoir toujours eu du mal avec les remakes, hormis HeartGold et SoulSilver, et ce n’est pas DEPS qui changera la tendance puisque je les vois comme de bien piètres remakes. Hormis quelques ajouts des jeux plus récents comme les raccourcis pour les objets rares, celui pour lancer une Ball en combat, l’accès au PC en consultant notre équipe ou l’ajout du type Fée, DEPS se contente de restituer, sans presque aucun effort, les jeux de 2006.
Cela se ressent d’ailleurs dès l’introduction qui reprend, plan par plan l’originale. Sur DS, cela permettait de montrer les capacités de la console avec cette simili 3D et l’impression que la perspective changeait en fonction de nos déplacements, créant la surprise en comparaison avec nos précédentes aventures sur GameBoy Advance. Malheureusement, les remakes n’ayant aucune ambition graphique, la séquence fait peine à voir.
Ce que j’avais d’ailleurs considéré comme un parti pris graphique doit en réalité être l’un des nombreuses preuves que les jeux ont été développés le plus rapidement possible. Permettre au joueur de se déplacer dans n’importe quelle direction est une bonne chose mais cela devient rapidement énervant lorsque nous nous coinçons dans des angles improbables car les décors sont pensés pour des déplacements en 2D. D’ailleurs, l’utilisation de la bicyclette ne fait qu’accentuer ce triste constat. Cela explique certainement pourquoi, lorsqu’un PNJ important entre en scène, dans une cinématique par exemple, ce dernier se déplace en 2D.
Concernant la faune locale, difficile de ne pas être lassé par cette dernière quand les herbes sont majoritairement composées de Keunotor, Ponyta ou Racaillou. J’imagine que c’est pour cela que les Souterrains accueillent désormais de nombreux biomes permettant de rencontrer de nombreuses autres créatures. Non seulement cela permet un plus grand choix dans la composition de nos équipes, mais en plus, le niveau de ces Pokémon augmente en fonction de notre avancée; un bon point malgré tout.
En revanche, exit les mini-jeux multijoueurs. Désormais, les seules activités communautaires seront le déterrages d’objets ainsi que les Bases Secrètes. Bien que de retour, elles n’ont plus grand intérêt, à part exposer quelques statues de Pokémon grises ou vertes, censées booster l’apparition de tel type de Pokémon dans les antres précités.
Comme dit plus haut, la Pokémontre est toujours présente mais j’ai trouvé son utilisation laborieuse. Devoir passer chaque application une à une pour enfin retrouver celle recherchée devient rapidement barbant au fur et à mesure que leur nombre augmente. D’autant plus que si l’écran tactile de la Switch est mis à contribution, aucun raccourci ne nous est proposé si nous jouons à la manette, de quoi rendre son fonctionnement lourd.
Entre tradition et modernité maladroite
Dans les précédents remakes, Game Freak avait eu le bon goût de proposer certains contenus provenant des jeux complémentaires ainsi que quelques nouveautés. Ce sont clairement sur ces points que les jeux d’ILCA manquent le plus d’ambition.
Par exemple, DEPS ne référence Pokémon Platine qu’à de rares exceptions. En conséquence, les Pokémon sauvages, leurs niveaux et les équipes des champions sont tirés de Diamant et Perle et la Zone de Combat ainsi que les changements scénaristiques sont aux abonnés absents.
La version complémentaire n’est pour autant pas reniée à 100% puisqu’en plus de quelques détails visuels, la tenue que porte les protagonistes est à télécharger via le Cadeau Mystère (à débloquer de façon honteuse), ses fonds de boîtes PC exclusifs sont disponibles et la Gracidée, l’Orbe Platiné ainsi que les appareils électroménagers permettant à Shaymin, Giratina et Motisma de changer de forme sont de la partie. Si l’obtention de l’orbe permet de référencer le Monde Distorsion, il aurait été plaisant de pouvoir directement s’y rendre, pourquoi pas en post game, histoire de concilier les histoires des trois jeux de la 4G.
A contrario, les jeux ont révélé contenir un objet qui m’avait fait forte impression dans HeartGold et SoulSilver : le lecteur DS. Après la ligue, il est donc possible parcourir la région en écoutant les musiques originales. Une surprise d’autant plus inattendue dans ces « fidèles » remakes.
J’aurais voulu être aussi enthousiaste concernant la possibilité à un de nos Pokémon de nous suivre. Malheureusement, à l’instar des DLC d’Épée et Bouclier, cette fonctionnalité est aux fraises. Outre le problème d’échelle de notre compagnon, ce dernier aura tendance à se laisser rapidement semer ou bien à rester bloqué en arrière, voire à se placer de sorte à se faire embarquer par un PNJ souhaitant simplement sortir de l’écran de jeu.
Si cela est énervant lorsque notre protagoniste est à pied, autant le faire manuellement rentrer dans sa Ball une fois notre bicyclette chevauchée puisque ce dernier essaiera, contre vents et marées, de nous suivre rendant la situation encore plus ridicule. Un cas bien curieux puisque notre accompagnant disparaissait de lui-même dans Pokémon Jaune et les remakes 2G lors de nos déplacements en vélo.
Parmi les quelques ajouts de DEPS, il faut compter sur l’apparition des Pokémon légendaires des générations 1 à 3 (ce qui semble désormais être sur le cahier des charges de chaque jeu Pokémon, pour une raison qui m’échappe). Autant j’apprécie le concept des tablettes en forme de cartouches GameBoy et GameBoy Advance, autant devoir passer des heures à trouver les éclats étranges dans les Souterrains, annoncés par Serebii comme étant rares, non merci.
Quitte à parler des légendaires, autant aborder un sujet sensible : le shinylock. Hormis les fabuleux Mew, Jirachi et Manaphy, il n’y en a tout simplement pas. Bonne nouvelle me direz-vous. Seulement, pourquoi est-ce que les légendaires principaux étaient shinylock dans Rubis Oméga et Saphir Alpha et Epée et Bouclier si Dialga et Palkia ne le sont pas dans notre cas ? Parce qu’ils sont déjà apparu sur Switch via les antre Dynamax de Couronneige ?
La logique qui entoure le procédé n’a jamais été comprise par les joueurs et DEPS rend la chose un peu plus complexe. A côté de cela, l’Etourmi rencontré au moment de choisir son starter ainsi que le Keunotor du tutoriel de capture ne sont toujours pas shinylock. A ce stade, la fidélité de DEPS à ses ainés en devient pathétique.
Toujours dans les sujets polémiques, je devais aborder le Multi Exp. Sujet à l’éternel débat « nuit-il à l’expérience de jeu ? » , je reste convaincu que pouvoir activer ses effets à la demande reste le meilleur compromis. D’autant plus que les jeux antérieurs à X et Y ne proposaient pas l’objet avec son fonctionnement actuel.
Voici précisément ce qui gène : DEPS étant une copie parfaite de DP, les combats contre les dresseurs sont légions et entrainent notre équipe bien plus que nécessaire puisque les jeux n’ont pas été conçus en fonction du gain d’expérience collectif, rendant notre aventure bien trop facile. Est-ce pour cela que le défi de la Ligue Pokémon fut recalibré, aussi bien au niveau des statistiques des Pokémon adverses que de leurs attaques et objets portés ?
J’allais presque oublier de parler de la customisation. De retour comme dans chaque jeu depuis X et Y (hormis ROSA), il est possible de changer d’habits mais seulement via une courte sélection de tenues. Impossible donc de joindre un haut et un bas différent, ce sera tout ou rien. De quoi se demander pourquoi avoir intégré cette fonctionnalité…
Dans le même esprit, les jeux prennent en compte le fameux type Fée, mais sans intégrer le moindre Pokémon des générations 5 à 8 ! Je suis d’accord que ce point peut-être débattu mais à mon sens, il aurait été de bon goût d’ajouter ne serait-ce que Nymphali, l’ambassadeur du type Fée justement, quitte à proposer un nouveau Pokédex régional conséquent à la place du Pokédex National à l’instar des jeux de septième génération.
Que penser de ces jeux ?
En conclusion, je n’explique pas l’existence de ces remakes tant ils semblent être le fruit de nombreux choix maladroits. Ils font à la fois preuve d’une fidélité dépassant l’entendement tout en se permettant d’innover, sans pour autant être ambitieux. Est-ce que le fait qu’ILCA se soit chargé du développement (sous la direction de Junichi Masuda) à la place de Game Freak, occupé avec Légendes Pokémon: Arceus, permet réellement de justifier le fait que DEPS soit autant en décalage avec ce que les autres remakes proposent ? Je ne saurais dire avec exactitude si il s’agit d’un remake ou d’un remaster, d’où le nom de la critique.
En parlant de LPA, quel est le lien entre ces jeux ? Leur sortie, étonnement rapprochée, pousse au questionnement puisqu’ils semblent inter-connectés au vu, notamment, de leur communication respective. Peut-être que les jeux sont complémentaires et que le second permettra d’obtenir et d’envoyer la Flûte Azur dans le premier, à la manière de l’oeuf de Manaphy à l’époque avec Pokémon Ranger ?
Quoiqu’il en soit, ça y est, les joueurs ont eu leur remake 4G. DEPS aura au moins le mérite de rendre à nouveau cette aventure accessible au plus grand nombre. Est-ce vraiment ce à quoi nous nous attendions, ou, du moins, étions légitimement en droit d’attendre ? Espérons que Légendes Pokémon Arceus, sortant la semaine prochaine, apportera quelques réponses.
En attendant, il reste à ILCA la possibilité de proposer un éventuel DLC surprise ou, et ce serait le strict minimum, la Carte Membre ainsi que la lettre de Chen, permettant de capturer (ou shasser) Darkrai et Shaymin.
